Yann Paolozzi/ LITTLE BOY

Exposition du 17 mars au 21 Avril

L’Amérique des fifties, des motels égarés le long des routes, des diners, des stations essence, du baseball, des polars à la Bullitt et des westerns à la Sergio Leone, des voitures immenses à la carrosserie effilée, de la Mustang au capot gonflé comme les muscles d’un culturiste et aux flancs arrondis comme les cuisses d’une femme : c’est de cette Amérique là que Yann Paolozzi est amoureux.

 Et non de l’Amérique contemporaine, qui trouve peu d’échos chez lui : au Las Vegas d’aujourd’hui que l’a tant déçu parce qu’il ressemble à un parc Disney, l’artiste préfère le vieux Végas, ses piscines vides en forme de haricot, ses enseignes de motels, ses planches de bois sur les fenêtres.

Le chromatisme, aussi : dans l’œuvre picturale de Paolozzi, les couleurs sont toujours franches, pures, fraîches, se détachant sur un fond blanc, sans jamais d’aplats, peintes par petites touches, par gribouillis parfois aussi. 

Une pratique artistique que l’on pourrait qualifier de néo-Pop, mais qui doit beaucoup aussi à l’amour du graphisme et de la typographie. 

Car, comme certains dadaïstes tels que Raoul Hausmann ou Kurt Schwitters, Paolozzi se définit comme un collectionneur obsessionnel, un chineur qui, regard tourné vers le sol, s’attache à ce qui n’a aucun sens pour les autres : de vieux tickets de parking ou de pressing, des papiers usagés, des sacs de plastique écrasés, qu’il choisit en fonction de leurs couleurs et de leur qualité graphique. Mais, à l’inverse des dadaïstes qui les insèrent de façon brute dans leurs photomontages ou sur leurs toiles, l’artiste-collectionneur les reproduits picturalement à l’identique, en taille réelle, « parasitant » le sens de ses toiles. Paolozzi réhabilite ainsi les notions disqualifiées de parasite, de ratage, de rayures, qu’il qualifie volontiers de « vibrance », mais se joue aussi des règles chronologiques. Ainsi, dans Sunny King Paramount, un œil attentif peut décrypter à côté du sigle rouge Paramount et de la grosse voiture Ford, le squelette d’un dinosaure, deux chevaux, une écorce et un échantillon de couleurs. 

l y a aussi une part d’enfance chez l’artiste, dont témoignent Water Pistol qui s’avère non pas une arme létale, mais un ludique pistolet à eau, et plus encore l’installation autour de Little Boy réalisée à la main et au cutter en polystyrène blanc extrudé : une moto Honda, un totem indien au sol, des flèches et des plumes. Que s’est-il passé ? L’installation, complétée par des structures de même matière de baskets, de casquettes, de clés de motels et d’une peinture en acrylique intitulé Little Boy Remington, ouvre à tous les scénarios possibles et à l’imaginaire. En l’occurrence, imaginons un petit voyou américain, casquette et baskets, visage masqué d’un foulard et armé d’un revolver, qui aurait dérobé un totem dans une réserve indienne, et demanderait une rançon en échange — d’où les dollars qui accompagnent l’installation. Les flèches ont fusé, les plumes du poulailler ont volé, le gamin arrivera-t-il au bout de sa cavale, comme dans les vieux westerns ?

Une nouvelle fois, la vision à la fois nostalgique et ludique d’une Amérique perdue, qui peu à peu s’efface, et dont Paolozzi restitue les vestiges, tel un archéologue. 

Dominique Baqué 

Publié par galeriemargueritemilin

Galerie d 'art contemporain- 11 rue Charles François Dupuis 75003 Paris

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